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« Ce que l’amitié de Noam Chomsky avec Jeffrey Epstein révèle sur la politique progressiste » par Kavita Krishnan

[article repiqué depuis le Blog Entre les lignes entre les mots. Merci Didier. Il concerne les liens de Chomsky, auteur entre autres de La fabrique du consentement, avec J. Epstein.]

L’icône de la gauche a fermé les yeux sur les violences sexuelles, tout comme les progressistes littéraires et culturels indiens ont embrassé un homme dont la condamnation pour viol a été annulée

« J’ai rencontré toutes sortes de gens, y compris des criminels de guerre majeurs. Je ne regrette pas d’avoir rencontré l’un d’entre eux. » Telle fut la réponse belliqueuse de l’intellectuel Noam Chomsky en 2023 à la question d’un journal sur ses liens avec Jeffrey Epstein [1]. Plus récemment, les courriels d’Epstein révèlent une amitié étroite avec Chomsky et son épouse [2].

Un témoignage (non daté mais rédigé en 2017 ou après) écrit par Chomsky pour Epstein présente un intérêt particulier. Il y décrit leur amitié de six ans comme une expérience « précieuse » et « enrichissante », grâce à l’étendue intellectuelle et aux idées d’Epstein, et affirme que « Jeffrey a pu organiser à plusieurs reprises, parfois sur-le-champ, des rencontres très productives avec des personnalités de premier plan dans les sciences et les mathématiques, ainsi que dans la politique mondiale, des gens dont j’avais étudié les travaux et les activités mais que je n’avais jamais espéré rencontrer. »

Dans la tristement célèbre interview de la BBC Newsnight, on a demandé à Andrew Mountbatten Windsor [3] si, rétrospectivement, sachant qu’Epstein était un pédophile et un prédateur sexuel, il ressentait une quelconque « culpabilité, regret ou honte » concernant son amitié avec Epstein. Non, répondit-il, « la raison étant que les personnes que j’ai rencontrées et les opportunités qui m’ont été données d’apprendre soit par lui soit grâce à lui étaient en fait très utiles… (cela) a eu des résultats sérieusement bénéfiques dans des domaines qui n’ont rien à voir avec (ses crimes). »

Chomsky et Andrew disent tous deux qu’ils ne regrettent pas d’avoir été amis avec Epstein parce que grâce à lui, ils ont pu rencontrer des personnes utiles et importantes.

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Communiqué d’Osez le féminisme « Contre les violences masculines :

Agir enfin sur le continuum des violences sexistes et sexuelles, lutter contre l’impunité, financer la protection« 

À l’occasion de la journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes, Osez le Féminisme rappelle l’urgence d’agir sur l’ensemble du continuum des violences sexistes et sexuelles et alerte sur la gravité du contexte budgétaire qui fragilise les associations de terrain.

Un continuum de violences fondé sur la domination masculine

Les violences sexistes et sexuelles traversent toutes les sphères de la société et tous les âges de la vie. Elles forment un continuum qui inclut notamment le harcèlement, les agressions, les viols, les violences au sein du couple, la prostitution et l’exploitation sexuelle, l’inceste, la pédocriminalité et l’ensemble des cyberviolences sexistes et sexuelles.

« Ce que l’on appelle violences sexistes et sexuelles n’est pas une série d’incidents isolés, mais l’expression systémique de la domination masculine », rappelle Aliénor Laurent, porte-parole d’Osez le Féminisme.

Certaines femmes sont encore plus exposées en raison de discriminations multiples, notamment lorsqu’elles sont racisées, en situation de handicap, migrantes ou étrangères, jeunes ou âgées, lesbiennes ou bisexuelles, ou lorsqu’elles élèvent seules leurs enfants. La précarité accentue les risques de violences et limite les possibilités de se protéger. Les attaques répétées contre les droits sociaux impactent d’abord les femmes, qu’il s’agisse du logement, des minimas sociaux ou des services publics. L’inceste et la pédocriminalité restent massivement sous-déclarés et sous-poursuivis. Ces violences s’ancrent dans les mêmes mécanismes que les violences faites aux femmes : domination masculine, rapports d’emprise, silence imposé aux victimes, impunité institutionnelle. Elles touchent majoritairement des filles et conditionnent durablement leur vulnérabilité future face aux violences sexistes et sexuelles. Les violences subies dans l’enfance s’articulent ainsi directement avec celles subies à l’âge adulte, révélant la nécessité d’une action cohérente et coordonnée.

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Mobilisations du 25 novembre

[repiqué sur le blog Entre les lignes entre les mots]

Pour la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes du 25 novembre, nous manifesterons en solidarité, comme nous l’avons déjà fait le 11 octobre, avec et pour les femmes du monde entier : celles qui sont victimes des violences machistes, des conflits armés, des famines, des spoliations de terres et de leurs biens naturels, des gouvernements réactionnaires et des états théocratiques. Avec toutes celles qui ne peuvent pas parler, dont les voix sont étouffées, qui subissent des violences sexuelles, des tortures et des mutilations.

Le 25 novembre nous marcherons pour rendre hommage à toutes les victimes de la violence machiste, les femmes, les filles, les personnes LGBTQIA+, à toutes celles qui souffrent et qui luttent, en dépit des risques encourus. A toutes celles que nous avons perdues.

Les violences et l’impunité des agresseurs persistent 8 ans après l’élection d’Emmanuel Macron, en plein #MeToo. La plupart du temps, encore, les victimes ne sont pas crues, les plaintes classées sans suite. Le parcours judiciaire revictimise bien souvent les femmes et constitue un obstacle à la sortie de la violence comme la baisse du financement public des associations d’accompagnement des victimes.

Les violences sexistes et sexuelles surviennent partout, et tout le temps : dans nos espaces familiaux, sur nos lieux de travail et d’études, dans l’espace public, dans les transports, dans les établissements de soin, les cabinets gynécologiques, dans les maternités, dans les ateliers des chaînes d’approvisionnement des multinationales, les commissariats, les centres de rétention, dans les milieux du théâtre, du cinéma, du sport, en politique… Dans tous les milieux sociaux.

Elles trouvent racine dans le patriarcat et se situent au croisement de plusieurs systèmes d’oppressions.

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« Pas tous les hommes quand même ! »

[Je repique cette courte chronique publiée dans le journal Bifisud n°57 du syndicat Sud au CHU de rennes]

« Pas tous les hommes quand même ! », c’est le titre d’un petit livre féministe au ton vif, colérique et plein d’humour, de Giulia Foïs, une journaliste. (2025, éditions La Meute, 11.5€.)

L’autrice revient dans son essai sur cette phrase répétée, ad nauseam, dés qu’un témoignage de violence sexiste et sexuelle voit le jour : « Pas tous les hommes quand même ! »

L’autrice montre en quoi cette phrase est une résistance aux dénonciations et analyses féministes. Elle fait en effet taire les victimes en détournant le sujet, elle minimise les violences masculines d’une société patriarcale, et cherche à nier le caractère systémique de celles-ci. Elle permet aussi aux hommes d’éviter un examen de conscience qui serait pourtant fort utile.  « Celui qui dit #NotAllMen souligne, en creux, que lui n’a pas violé. Estimant sans doute qu’il mérite des lauriers. Oubliant que c’est le minimum qu’on puisse lui demander. (…) Cesser de dire #NotAllMen, c’est trouver la force de s’interroger : dans ce système que je dis conchier, quel a été mon rôle ? » Et lequel est-il aujourd’hui ?

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Pourquoi nous soutenons le projet de loi « Inachetable » d’Ash Regan au Parlement écossais

[Repris sur le blog Entre les lignes entre les mots : https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2025/11/01/pourquoi-nous-soutenons-le-projet-de-loi-inachetable-dash-regan-au-parlement-ecossais/ Merci]

Ash Regan, membre du Parlement écossais (MSP), a présenté au Parlement écossais le projet de loi sur la prostitution (infractions et aide) (Écosse), communément appelé « projet de loi anti-prostitution ». S’il est adopté, ce projet de loi introduira en Écosse l’approche du modèle nordique en matière de politique et de législation sur la prostitution.

Nous soutenons très fortement ce projet de loi et espérons de tout cœur qu’il sera adopté. Nous avons donc été ravies d’être invitées à témoigner devant la commission de la justice pénale du Parlement écossais le 8 octobre 2025, lors de l’examen du projet de loi.

Amanda Quick, l’une des survivantes de la prostitution du groupe Nordic Model Now !, a accepté de s’y rendre. Bien qu’elle se soit déjà exprimée via Zoom lors de plusieurs événements organisés en Écosse par d’autres organisations, c’était la première fois qu’elle s’exprimait aussi publiquement (la session était diffusée en direct) sur cette question profondément personnelle. Mais nous étions convaincues que si quelqu’une pouvait faire comprendre la réalité brute et sans fard aux membres de la commission, c’était bien elle. Et c’est exactement ce qu’elle a fait. Et même plus.

Dans ce cadre formel du Parlement écossais, lors d’une session présidée par une femme qui rappelait sans cesse à tous et toutes les participantes qu’elles et ils devaient discuter du projet de loi et non d’autres questions, aussi pertinentes soient-elles, Amanda a résolument ramené tout le monde à la réalité chaotique : les droits et la cruauté des clients masculins, la violence, la misère et l’érosion de son estime de soi jusqu’à ce qu’il lui devienne impossible d’envisager toute autre existence. Cela a nécessité un courage et une force extraordinaires, qui nous inspirent le plus grand respect.

À ses côtés, deux autres femmes brillantes participaient au panel : Diane Martin CBE, présidente du groupe de campagne A Model For Scotland et elle-même survivante de la prostitution, et Bronagh Andrew, directrice des opérations de Tara and Routes Out Services à Glasgow. Toutes deux éloquentes et très compétentes, elles ont également apporté à la session une expertise indispensable.

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Préface d’un nouvel essai sur la mouvance masculiniste

Voici la présentation par la journaliste LÉA CARRIER d'un essai de la Norvégienne Annvor Seim Vesthreim qui doit paraître fin octobre au Québec, aux Éditions du remue-ménage: "LES INCELS. DU CLIC À L'ATTENTAT"

À l’automne 2023, j’ai été invitée à donner une conférence sur le journalisme dans une école secondaire de la banlieue de Montréal. Il faisait froid, ce jour-là, et le contraste en entrant dans la classe m’avait saisie d’un coup. Vers la fin de la présentation, on aurait dit un four. Assis au premier rang, trois garçons ricanaient depuis une dizaine de minutes, achevant le peu de concentration qui restait au groupe. Penchés sur leur tablette électronique, ils avaient tapé mon nom dans Google et, de toute évidence, ce qu’ils avaient trouvé les amusait beaucoup, à moins que ce ne fût que je parus brièvement déstabilisée par leur insolence. Je n’en ai pas pensé plus que cela. « Boys will be boys », dit-on. Les garçons seront des garçons.

Après la présentation, une élève m’a approchée. C’était une jeune fille à l’allure discrète, qui parlait d’une voix délicate. « Connaissez-vous Andrew Tate ? », m’a-t-elle demandé. En effet, ce nom m’était familier. Un an plus tôt, je m’étais penchée sur la montée en popularité des influenceurs  masculinistes sur les réseaux sociaux. Promouvant un retour aux valeurs traditionnelles, ces influenceurs déplorent une crise de la masculinité supposément causée par le féminisme et, pour affirmer leur autorité, prodiguent des conseils à un jeune public impressionnable : voici ce qu’est un vrai homme et comment le devenir en cinq étapes faciles. Andrew Tate, kickboxeur angloaméricain recyclé en hommes d’affaires et misogyne autoproclamé, est certainement le plus connu – et le plus controversé – d’entre eux (accusé de 21 chefs d’accusation au Royaume-Uni, dont viol et traite humaine, il a depuis été banni des réseaux sociaux). Lorsque j’ai commencé à m’intéresser au phénomène, il n’était pas clair si les influenceurs masculinistes, états-uniens pour la plupart, trouvaient un public au Québec. Mais c’était le cas. La jeune fille devant moi voulait m’en alerter. Dans les derniers mois, son petit frère s’était mis à suivre Andrew Tate religieusement. Il tenait des propos de plus en plus extrêmes sur les femmes, minimisant les accusations portées contre le célèbre influenceur. À l’école, les garçons parlaient de lui comme de leur idole, défendant ses positions les plus rétrogrades, parfois même en classe. J’ai repensé aux trois garçons qui dérangeaient pendant la présentation : faisaient-ils partie de ses admirateurs ? Quoi qu’il en soit, le témoignage de cette adolescente m’a replongée dans l’univers des influenceurs masculinistes. Seulement, cette fois, je pouvais faire la démonstration que leur discours trouvait écho chez de jeunes Québécois.

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La France à nouveau condamnée par la Cour Européenne des droits de l’homme (CEDH) dans une affaire de viol sous couvert de BDSM

Ce jeudi 4 septembre, la France est à nouveau condamnée par la CEDH, cette fois dans une affaire de viols et de violences sadiques. Dans cet arrêt, la CEDH prend acte que la notion de consentement est déjà au cœur de la définition du viol en France et ce en raison de la jurisprudence. En revanche, elle considère que l’interprétation qui est faite du consentement par les juridictions nationales est une violation de l’article 3 de la Convention Européenne des droits de l’homme. La CEDH sanctionne donc la pratique jurisprudentielle française et vient préciser que dorénavant, il faudra, systématiquement et nécessairement, apprécier le consentement donné à l’aune de l’environnement coercitif dans lequel le consentement a pu être extorqué. Notamment, un “contrat” BDSM ne sera plus considéré comme un consentement réel mais comme un instrument de coercition.

Dans cette affaire, les violences sadiques ont été commises dans un contexte professionnel, la victime et l’agresseur travaillant dans le même hôpital, elle avec un contrat précaire, lui avec un poste à responsabilité. Conformément à la stratégie classique des agresseurs, ce dernier avait, aux fins de garantir son impunité, installé une situation de contrôle coercitif et fait signer un “contrat maître-chienne” à sa victime aux termes duquel elle “consentait” à des actes d’humiliation et de violences. En raison de ce “contrat”, les institutions judiciaires françaises ont estimé qu’il n’y avait pas eu de viols. Après avoir épuisé les voies de recours internes, la victime s’est tournée vers la CEDH.

L’AVFT, qui a accompagné et soutenu la victime depuis le début de la procédure était co-requérante, et Osez le Féminisme a présenté un mémoire en tierce intervention en soutien de la requérante pour déconstruire les mythes patriarcaux du BDSM invoqués par les auteurs de violences sexuelles au service de leur stratégie d’impunité.

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Julie Bindel : « Les conjoints violents et auteurs d’abus sexuels peuvent-ils être « traités » avec succès ? »

Si ce n’est pas le cas, pourquoi ? Après tout, les féministes, dont je fais partie, affirment que la violence masculine n’est ni naturelle ni inhérente. Mais poursuivez votre lecture…

Le mois dernier, il a été annoncé que le ministre de l’Intérieur allait allouer 53 millions de livres sterling au cours des quatre prochaines années pour développer des programmes destinés aux auteurs de violences conjugales (PIVC). Ces programmes visent à modifier le comportement des hommes qui maltraitent leur partenaire afin de réduire le risque de nouvelles violences. Pour replacer cette mesure dans son contexte réel, l’organisation Women’s Aid a récemment annoncé la fermeture de son service de soutien en ligne aux femmes en raison d’un manque de financement, et trois centres britanniques d’aide aux victimes de viol ont fermé leurs portes au cours de l’année dernière.

La baronne Newlove, commissaire aux victimes pour l’Angleterre et le Pays de Galles, a salué cette nouvelle de ce financement de PIVC, la présentant comme un exemple clair de la priorité accordée par le gouvernement à la lutte contre la violence conjugale dans sa prochaine stratégie contre les violences envers les femmes et les filles.

Cependant, en tant que militante contre la violence masculine depuis plus de 40 ans, je pense que cette décision est vouée à l’échec.

Le bénéficiaire de cette aide de plusieurs millions de livres sterling est le partenariat DRIVE, créé en 2015 et composé d’organisations spécialisées dans la sensibilisation des auteurs de violences conjugales.

Ces programmes destinés aux auteurs de violences ont été importés des États-Unis par des défenseurs bien intentionnés, qui soutiennent que puisque de nombreux agresseurs ne sont même pas signalés à la police, et encore moins traduits en justice, ces initiatives pourraient contribuer à rendre redevables un plus grand nombre d’hommes violents et à assurer la sécurité d’un plus grand nombre de femmes grâce à la réhabilitation de ces hommes.

Malheureusement, il n’existe pratiquement aucune preuve crédible que ces cours changent réellement les hommes (sauf peut-être à court terme, jusqu’à ce que leurs femmes et leurs partenaires acceptent le mantra « je vais changer » et acceptent de les reprendre à charge).

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Affaire French Bukkake : Une décision historique de la Cour de cassation [Communiqué]

Nous, associations, organisations et femmes politiques, féministes, antiracistes et engagées pour la dignité humaine, nous nous félicitons de l’arrêt rendu le 16 mai 2025 par la Cour de cassation dans l’affaire dite French Bukkake. Cet arrêt vient heureusement censurer une décision de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris de février dernier qui était profondément entachée de stéréotypes sexistes et racistes, et gravement défavorable aux victimes.

En effet, aujourd’hui, la plus haute juridiction reconnaît, bien évidemment, que les nombreux viols que les parties civiles ont subis dans leur chair étaient aggravés par le sexisme et le racisme des propos qui les accompagnaient. La Cour de cassation, et c’est en cela un arrêt totalement inédit, a également fait une application stricte de la loi, conformément aux nombreuses conventions internationales et textes européens contraignants (telles que les Conventions sur la traite et les directives européennes). 

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Préfaces au livre de Carine Durrieu Diebolt : Violences sexuelles : Quand la justice maltraite, Les leçons du procès Pelicot

Carine Durrieu Diebolt : Violences sexuelles : quand la justice maltraite
Les leçons du procès Pelicot

Editions Syllepse, Paris 2025, 128 pages, 10 euros
commande ici : https://www.syllepse.net/violences-sexuelles-quand-la-justice-maltraite-_r_22_i_1128.html
  • Magali Lafourcade : Victimisation secondaire et processus judiciaire
  • Charlotte Arnould : De la justice j’attendais tout

Victimisation secondaire et processus judiciaire

Nous nous faisons souvent une très haute idée de la justice, mais s’agissant du traitement des violences sexuelles, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent pour dénoncer un double écueil. D’une part, une justice qui classe massivement sans suite les plaintes et condamne peu les auteurs, au risque de nourrir un sentiment d’impunité. D’autre part, une justice qui permettrait le déploiement d’une violence, cette fois institutionnelle.

Récemment, s’est en effet imposée dans le débat public l’idée que le processus judiciaire en lui-même pourrait être porteur d’une violence pour les plaignantes et plaignants, déjà traumatisés par les violences sexuelles subies. Sous le vocable de « victimisation secondaire » c’est tout le processus judiciaire, de la conduite des investigations à la motivation des décisions, en passant par l’audience de jugement, qui se trouve interrogé.

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Pourquoi les victimes de l’affaire French Bukkake ont décidé d’aller en Cassation (reçu par Osez le féminisme)

Téléchargez le communiqué de presse

Le 11 avril, est sorti le livre Sous nos regards : Récits de la violence pornographique dans lequel 15 autrices recueillent les témoignages de 16 plaignantes des affaires dites « French Bukkake » et « Jacquie et Michel ». Elles y dénoncent les sévices extrêmes endurés : viols collectifs, actes de torture et de barbarie, humiliations racistes et sexistes, manipulation, séquestration, et diffusion publique de leurs viols. Longtemps réduites au silence, elles s’imposent désormais dans l’espace public au prix d’un courage inouï.

Pourtant, face à l’institution judiciaire, leur parole continue d’être niée : quatre ans après les premières mises en examen, la chambre de l’instruction a ordonné le renvoi de 16 pornocriminels pour viols aggravés, proxénétisme et traite des êtres humains tout en refusant la qualification d’actes de torture et de barbarie et les circonstances aggravantes de sexisme et de racismeEn outre, elle a interprété de manière bien trop restrictive l’infraction de proxénétisme. Les motivations de la chambre de l’instruction sont scandaleusement biaisées par la culture du viol et par la misogynie, ce qui est frontalement contraire aux droits garantis par la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH).

L’enquête révèle :

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« L’affaire French Bukkake » 

La pornographie est banalisée depuis des années. La pornographie, vous savez, ce ne serait que des images, des représentations de la sexualité, ou une façon de découvrir le sexe ; pour les hommes et pour les femmes.

Alors, le livre Sous nos regards – récits de la violence pornographique tombe à point nommé. Il est une pièce à charge dans ce qu’on appelle désormais « l’affaire French Bukkake » ; impliquant entre autres Julien Dhaussy, Pascal Ollitrault, dit Pascal OP, ainsi que le site Jacquie et Michel (Piron).

« Il y avait quelqu’un dans ce corps, après tout », tel est l’épigraphe de Toni Morisson qui ouvre le livre.

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Stéphanie Lamy : la terreur masculiniste

Interviewée par Sandrine Goldschmidt

Stéphanie Lamy est chercheuse spécialiste des guerres de l’information et militante féministe. Avec La terreur masculiniste, parue aux Éditions du détour, elle s’attaque aux réseaux d’hommes qui prônent la violence contre les femmes. Passionnant.

Stéphanie Lamy, pourquoi ce titre, « La terreur masculiniste » ?

C’est une réponse à la couverture de Valeurs actuelles qui avait titré «la terreur féministe» en 2019. L’idée est de proposer un miroir reformant, pour rappeler que la vraie terreur vient des masculinistes, ces hommes qui inventent ou réinventent mille façons de haïr les femmes et de justifier la violence à leur égard.

Comment définissez-vous le terrorisme masculiniste ?

Alors que d’autres ont déjà très bien parlé des mouvements masculinistes, j’ai voulu observer, analyser et mettre les mots justes dessus. En tant que militante, j’ai souvent lancé un « t’es un mascu » mais je ne le fais plus, parce que ce n’est pas la même chose que la misogynie. La misogynie, c’est la haine des femmes à titre individuel.
L’idéologie masculiniste, c’est la collectivisation de cette haine.

Pourquoi ce titre ?

La terreur masculiniste est donc un ensemble d’offres idéologiques « identitaires masculines » construites au sein de milieux de radicalisation en ligne ou dans la vraie vie, qui font l’apologie ou prônent la violence à l’égard des femmes et des minorités sexuelles. Avec pour objectif de maintenir ou renforcer la domination masculine.

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Enseignements féministes de la guerre

Alors que la guerre ne cesse de faire rage dans différentes régions du monde et que les menaces d’extension des conflits se précisent, je me permets de donner un coup de pub pour un livre publié récemment par les éditions Solanhets.

Traduit par Béatrice Solanet et Joseph Cuétous
ISBN : 979-10-94791-32-5 (broché)
Prix : 20 € (broché)

C’est le 3ème ouvrage de Cynthia Enloe publié par ces mêmes éditions.

Extrait :

Les enseignements féministes concernent tout le monde
Un enseignement utile est toujours en mouvement. Il n’est pas statique. Il n’est pas juste fait pour être répété par cœur. Un enseignement féministe, avant tout, c’est comme une allumette pour enflammer un embrasement de pensée.
Les enseignements féministes présentés ici sont douze… et les suivants. Chacun de ces douze enseignements est apparu après des années de réflexions, de recherches, d’interrogations, de comparaisons, de décomptes, de discussions, de récits et d’échanges – et de nouvelles réflexions. Les assimiler, puis agir à partir de chacun de ces enseignements féministes, confère une fiabilité supérieure à nos connaissances de la guerre, ce qui nous confère, en retour, une plus grande valeur en tant que membres de la cité – de nos propres pays, et du monde entier.
Le féminisme n’est pas un club. C’est un réseau poreux, et en expansion permanente, de femmes et d’hommes qui réfléchissent sérieusement sur la vie complexe des femmes, sur les relations des femmes avec les hommes, avec les États et entre elles. Le féminisme consiste à interroger, à partager, à explorer les mécanismes de l’inégalité et de l’injustice. Tout le monde peut participer à ce questionnement engagé – un questionnement sur les blessures, un questionnement sur l’expertise, un questionnement sur la « chair à canon », un questionnement sur la sécurité, un questionnement sur l’esclavage sexuel, un questionnement sur la reconstruction, un questionnement sur le « brouillard de guerre ».
Une mise en garde : il faut de la ténacité dans ses interrogations pour devenir et rester féministe. C’est ce que nous ont montré toutes les femmes militantes présentées dans ce livre. Le patriarcat – et les personnes tirant profit du privilège qu’elles octroient à certains types de masculinités – a besoin que nous manquions de ténacité, que nous nous épuisions à la tâche. Le patriarcat compte sur le fait que nous nous retirions dans un individualisme superficiel, un fondamentalisme insensé ou un cynisme pseudo-sophistiqué.

Témoignage de Chuck Derry, ex-conseiller pour conjoints agresseurs

En 1983, j’ai entamé un emploi auprès d’une organisation féministe du Minnesota (États-Unis) qui collaborait avec le système de justice pénale et civile pour créer des politiques et des protocoles écrits et signés afin de tenir responsables de leurs actions les conjoints agresseurs (ceux maltraitent leurs femmes et/ou leurs copines). Dans le cadre de ce projet, cette organisation a créé un programme d’intervention auprès des agresseurs de 24 semaines dans lequel la majorité des hommes ont été mandatés par les tribunaux pour participer à un groupe de responsabilisation à raison d’une séance par semaine, pendant 24 semaines. Lorsque nous avons créé ces groupes, nous pensions que les hommes exerçaient ces violences intimes parce qu’ils avaient des problèmes de « gestion de la colère » ou qu’ils avaient simplement « perdu le contrôle d’eux-mêmes ».

Ensuite, ce groupe, le Domestic Abuse Intervention Program de Duluth, au Minnesota, a organisé un groupe de discussion avec des femmes victimes de violence et a créé le schéma de Roue du pouvoir et du contrôle (ci-dessous), que plusieurs d’entre vous connaissez probablement. Lorsque j’ai vu ce schéma pour la première fois, j’ai réalisé que cette violence et ces comportements d’agression reflétaient en fait des choix conscients et délibérés, qui visaient des buts concrets.

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« A Mazan, Dominique Pélicot organise les viols de sa femme, ailleurs, un mari organise la prostitution de sa femme… est-ce différent ? » par Geneviève Duché

Merci Gisèle Pélicot ! merci de votre courage, merci d’avoir tenu, voulu, témoigné, d’avoir rappelé qu’une victime de violences sexistes et sexuelles, contrairement à ce que ce mot victime traîne à tort de représentations de passivité, de mièvrerie, même de la part de certaines féministes – est aussi une femme debout, forte, solidaire et déterminée à mettre en lumière la violence masculine et d’un système de domination, réclamant justice pour elle et pour toutes les femmes. Nous vous avons apporté des fleurs, applaudie pour dire notre sororité et le partage de votre douleur et de celle de votre famille. Grâce à vous, la justice française a été (jusqu’à aujourd’hui et enfin !) à la hauteur de l’enjeu de ce procès avec les moyens du droit et de la loi que nous avons et que nous devons pour grande partie à une autre Gisèle depuis le procès d’Aix en Provence en 1978. Mais attendons les verdicts. Grâce à votre courage et à celui de vos enfants, pendant trois mois il a été clair pour toutes et tous que l’intime est politique. Mais nous savons aussi que votre souffrance et celle de votre famille, que les effets destructeurs sur votre santé ne s’arrêtent pas à ce moment terrible et public qui a révélé l’impensable et qui laisse encore des zones d’ombre, comme l’inceste, avec lesquelles votre fille en particulier devra se battre.

A nous, les féministes en lutte contre les violences sexuelles et sexistes, en lutte contre le patriarcat, de poursuivre, de ne jamais laisser retomber notre mobilisation, de ne jamais laisser oublier ce que vous avez permis, à savoir :

De mettre en lumière une violence masculine intentionnelle, préméditée, organisée, destructrice, transformant une femme en corps inerte pour la jouissance d’une centaine d’hommes pendant des années.

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(Communiqué de presse) Crimes de l’industrie pornographique : les faits doivent être jugés dans leur intégralité

Le 17 octobre, la cour d’appel de Paris rendra une décision importante dans l’affaire dite “French Bukkake”. Les dizaines de victimes des crimes de l’industrie pornographique devront-elles se contenter d’une justice au rabais ?

Quatre ans. Cela fait plus de quatre ans que les 42 victimes qui se sont portées parties civiles dans l’affaire dite « French Bukkake » attendent le procès des hommes qui les ont exploitées sexuellement. Dans cette affaire dévoilant les rouages criminels de l’industrie pornographique française, 17 hommes ont été mis en examen pour viols en réunion, traite d’êtres humains en bande organisée et proxénétisme aggravé.

Les violences que ces femmes ont subies sont insoutenables. Manipulées et prises au piège par un rabatteur, elles ont été violées à de multiples reprises. Le dossier d’instruction contient des centaines d’heures d’images de violences sexuelles extrêmes.

L’une des victimes associe les multiples viols qu’elle a subis à de la torture : « J’ai été violée 240 fois, ce n’est pas de la torture ça ? Quatre-vingt-huit fois sur le bukkake, quarante-quatre fois en une heure. Je sais que j’ai été violée, ce n’est pas ça le sujet, le sujet c’est la torture. Aucun humain n’est capable d’absorber quarante-quatre pénétrations en une heure », témoigne l’une des victimes. 

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Un militant LGBT français de premier plan arrêté pour le viol et la torture d’une fillette de 4 ans gravement handicapée

Audrey A propose ici une traduction [grand merci pour votre travail !] d’un article détaillé publié par Anna Slatz sur le site Reduxx, compte tenu du fait que la presse généraliste française n’a pas immédiatement exposé certains aspects concernant l’accusé dans cette affaire. Cet article vise donc à présenter une vue d’ensemble plus complète des faits rapportés.

Un éminent militant LGBT français a été arrêté et accusé d’avoir infligé des actes de viol, torture et barbarie à une petite fille souffrant d’un grave handicap du développement. Pierre-Alain Cottineau, 32 ans, a été appréhendé le 23 septembre à son retour de vacances en Tunisie, à l’aéroport de Nantes.

Cottineau était une figure connue en Loire-Atlantique pour son militantisme politique, notamment en faveur de la communauté LGBT, des jeunes et des minorités. En 2021, il s’était présenté aux élections départementales sous la bannière de La France Insoumise (LFI), politique de gauche appliquant une politique de « tolérance zéro » à l’égard des « propos ou comportements sexistes, racistes, antisémites ou LGBTIphobes » parmi ses membres.

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Procès des violeurs de Mazan : « Ils m’ont traitée comme un sac poubelle », par Claudine Legardinier

« Un procès hors normes » a titré la presse. Est-elle vraiment si « hors normes » cette affaire Pélicot ? Une cinquantaine d’hommes comparaissent pendant 4 semaines pour viols aggravés infligés pendant 10 ans à une femme droguée par son mari et livrée à ces hommes inconsciente. 

Des monstres ? Non, des hommes tout ce qu’il y a d’ordinaires qui ont profité de « l’offre » d’un mari pornographe ; des hommes prêts à tout pour s’affranchir du consentement d’une femme… et s’ils n’ont pas payé le mari en argent, on peut ici parler « d’échange », puisque les uns ont eu à leur disposition une femme sans avoir besoin dudit consentement, l’autre a obtenu des « acteurs » gratuits pour son fantasme : les vidéos pornos qu’il tournait. Et par lesquelles, heureusement, il a été découvert.

Après le cataclysme de la découverte des faits, on peine à imaginer la force qu’il faut à Gisèle Pélicot (71 ans) pour faire face à son ex-mari et à 50 de « ses » violeurs ; pour voir déballée sa vie intime et épluchés les dizaines et dizaines de viols qu’elle a subis comme « une poupée de chiffon » ; et pour survivre au gouffre qui s’ouvre quand on croit avoir partagé avec un mari attentionné cinquante ans de vie commune…

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Rejoignez la mobilisation en soutien à toutes les victimes de violences sexuelles !

A l’initiative de plusieurs militantes féministes, un rassemblement en soutien à Gisèle Pélicot, aux autres victimes des viols dans l’affaire de Mazan et à toutes les victimes de violences sexuelles est organisé ce samedi 14/09 dans plusieurs villes de France. 
A Paris, il aura lieu à 14h à la Place de la République. 
Osez le Féminisme sera présente dès 13h30 : rejoignez-nous !

Samedi 14 septembre : appel à la mobilisation dans toute la France en soutien à toutes les victimes de violences sexuelles 
Violences intrafamiliales, soumission chimique, impunité des prédateurs sur internet, inceste, viol conjugal, errance médicale, entourage et voisinage complice : l’affaire Pélicot est emblématique du caractère massif et banal des violences  qu’il faut combattre urgemment.

Nous nous trompons en appelant ce procès  “Affaire Mazan” ou même “Affaire Pélicot”. C’est avant tout l’Affaire des 82 violeurs. C’est aussi l’occasion de se mettre face à la triste banalité du profil des hommes derrière les viols, pour enfin affronter cette réalité. Ami de la famille, inconnu du bar ou de la rue, frère ou cousin, copain, collègue, professeur, voisin : toutes les femmes pourront malheureusement trouver un visage qui les ramène à un souvenir traumatisant parmi la multitude des accusés de Mazan.

Cette affaire est à l’intersection de tout ce que les associations dénoncent depuis des années. Maintenant, il faut des actes. 

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#Metoo syndical : Un procès historique contre la parole de femmes syndicalistes

Appel à la solidarité syndicaliste et féministe

Nous, militantes syndicalistes et féministes, en appelons à votre solidarité et à votre soutien pour notre camarade Christine, qui passe en procès pour diffamation les 30 septembre et 1er octobre 2024 à Paris.

En 2016 et 2017, plusieurs militantes de l’Union Syndicale CGT ville de Paris sont harcelées et/ou agressées par des membres de leur organisation. Contre ces agressions physiques et sexuelles, le collectif Femmes Mixité du syndicat se réunit et mène plusieurs actions. Elles font face à une immense hostilité de certains militants. Christine est membre de ce collectif et co-secrétaire générale du syndicat CGT Petite Enfance de la Ville de Paris.

C’est elle qui fait, au congrès de l’UD CGT de Paris en 2020, le rapport des actions menées par le collectif, et c’est pour cette raison que Régis Vieceli, alors secrétaire général du syndicat CGT déchets et assainissement (FTDNEEA), porte plainte contre elle pour diffamation. (Pour en savoir plus : https://www.mediapart.fr/journal/france/270618/violences-et-agissements-sexistes-l-affaire-que-la-cgt-etouffee).

La Confédération CGT est elle aussi poursuivie en la personne de Philippe Martinez, alors secrétaire général, pour le travail d’enquête mené par la cellule de veille confédérale contre les violences sexuelles.

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Un prédateur sexuel et futur médecin ?

Mesdames et Messieurs, 
Nous souhaitons par la présente vous alerter sur une situation extrêmement préoccupante au sein de l’université de médecine de Limoges.

Celle-ci accueille depuis la rentrée 2021 un étudiant originaire de Tours, accusé de viol et d’agressions sexuelles, qui a depuis été condamné à deux reprises.

Il poursuit tout de même ses études parmi les autres étudiants en 6ème année de l’université, et passe au mois de mai 2024 le concours de l’internat.

Les faits 
En 2021, à la suite du dépôt de cinq plaintes pour viol et agression sexuelle, un étudiant en médecine de l’université de Tours est interdit de territoire en Indre et Loire, et après 2 mois de détention provisoire, placé sous contrôle judiciaire. 

Deux des plaignantes sont mineures au moment des faits, trois sont des camarades de promotion. Les agressions se sont déroulées sur une période s’étendant de 2013 à 2020. 

Les parents de l’accusé sont tous les deux médecins à Tours, et d’anciens camarades de fac du Doyen de ladite université.

Ce dernier n’engage aucune mesure disciplinaire à l’encontre du mis en cause, ce qui lui sera reproché par l’Inspection Générale de l’Education, du Sport et de la Recherche (IGESR), dans un rapport d’enquête en 2022. 

Pour autant, aucune sanction n’est prise à l’issue de la publication du rapport : ni de manière rétroactive envers l’étudiant, ni envers le Doyen pour sa gestion contestable de l’affaire, qui avait éveillé à l’époque des soupçons de complaisance envers l’étudiant et ses parents médecins.

L’étudiant peut alors poursuivre ses études de médecine

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Préface de la Dre Muriel Salmona au livre de Lundy Bancroft : « Pourquoi fait-il ça ? Dans l’esprit des conjoints violents et maltraitants »

Pourquoi fait-il ça ? de Lundy Bancroft est un livre précieux et salvateur pour les femmes victimes de violences conjugales. Il ne se contente pas de répondre aux questions qu’elles peuvent se poser sur leurs conjoints violents ni de les outiller pour mieux s’en protéger, il se met résolument de leur côté avec le souci de leur rendre justice et de remettre le monde à l’endroit en dévoilant l’intentionnalité de nuire et les mensonges des hommes violents. Et cet enjeu est de taille face au déni qui règne dans notre société sur ces violences, déni alimenté par de fausses représentations, des stéréotypes sexistes, et une véritable propagande anti-victimaire qui culpabilise les victimes et dédouane les agresseurs en leur assurant une impunité quasi complète. Les femmes victimes elles-mêmes sont les premières contaminées par ce déni et ont les plus grandes difficultés à se sentir légitimes pour se défendre et pour dénoncer les violences qu’elles subissent. Ce déni contamine également les personnes qui pourraient les secourir, les protéger et les accompagner, leurs proches, les professionnels des secteurs de la police, de la justice, du soin et du social. Tout au long de son livre, fort de sa longue expérience auprès d’hommes violents, Lundy Bancroft s’attaque à ce déni. Dès les premières pages il nous prévient qu’il ne faut pas prendre pour argent comptant le discours et les justifications des hommes violents, mais toujours les confronter aux témoignages de leurs conjointes, voire de leurs ex-conjointes.

Dans nos sociétés patriarcales, les projecteurs sont presque toujours dirigés sur les femmes victimes pour leur demander des comptes, les questionner sur leurs comportements et les culpabiliser : « Qu’ont-elles bien pu faire pour rendre leur conjoint aussi violent ? ». Lundy Bancroft braque au contraire les projecteurs sur les hommes violents, sur leurs manipulations et leurs mensonges. À l’aide de nombreux exemples étayant une analyse implacable il démontre que les violences conjugales reposent sur une imposture totale. Les hommes violents sont de bons acteurs, ils jouent des rôles tout à tour pour séduire, manipuler, intimider, terroriser, culpabiliser leurs victimes afin de les contrôler et de les exploiter, et de garantir leur impunité. Ils excellent pour mettre en scène l’amour, l’énervement, la contrariété, la colère, la frustration, la jalousie, la perte de contrôle, le désespoir, l’indignation, la vengeance, le déni, le repentir… Les violences psychologiques, physiques et sexuelles qu’ils exercent n’ont pour but que de blesser et traumatiser leur victime. Ils savent bien que les justifications qu’ils donnent sont fausses et injustes, les violences leur sont juste nécessaires pour dominer et mettre en place un contrôle coercitif afin de posséder, asservir et instrumentaliser leurs victimes. Les violences sont un outil terriblement efficace pour détruire la capacité de défense, la confiance en soi et l’estime de soi des victimes, et leur faire croire qu’elles n’ont aucune valeur, aucun droit ni aucune dignité.

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Catharine A. MacKinnon : Le Viol redéfini – Vers l’égalité, contre le consentement (« une pub » pour le livre)

Vers l’égalité, contre le consentement

[Un livre important, avec des propositions pour améliorer le droit, entre autres en France. Une critique profonde du concept de consentement : "Le consentement est la tolérance d'une violation des limites"; "Même les dynamiques psychologiques de la coercition, y compris par l'inégalité, sont bien plus facilement observables chez les parties depuis l'extérieur, que celles liées au consentement".]

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Mobilisation contre l’assistanat sexuel :Le président Macron doit arrêter de faire planer le doute

Lors de son discours à l’occasion de la Conférence nationale du handicap fin avril dernier, Emmanuel Macron s’est exprimé sur les enjeux de la vie affective, amoureuse, intime et sexuelle des personnes en situation de handicap, annonçant alors le lancement d’un plan d’action d’ici l’été.

Nous tenons à vous faire part de notre ferme opposition au lancement de toute expérimentation de l’assistance sexuelle

Nous estimons nécessaire d’alerter dès à présent sur les conséquences qu’entrainerait l’assistanat sexuel, et nous avons besoin de votre mobilisation. 
Un courrier type a été écrit par la Cordination Française pour le Lobby Européen des Femmesque vous pourrez compléter et envoyer au Président de la République (via ce formulaire).

En 2016, la France faisait le choix décisif de mettre fin à la violence machiste que constitue la prostitution. Pour cela, une loi juste et courageuse a été adoptée prévoyant la dépénalisation des personnes en situation de prostitution (à 80% des femmes), la mise en place de parcours de sortie de prostitution, d’actions de prévention et l’interdiction de l’achat d’actes sexuels (commis à 99% par des hommes).

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Protégez les survivantes

Le Conseil d’Etat doit revoir sa jurisprudence pour garantir une protection effective, au titre de l’asile, des femmes nigérianes victimes des réseaux de traite humaine

Saisi par 3 femmes nigérianes victimes de réseaux criminels de traite humaine à des fins d’exploitation prostitutionnelle, le Conseil d’Etat a f opportunité de rendre effective la protection, au titre de l’asile, des femmes victimes de ces réseaux.

Depuis plus de 30 ans, des milliers de femmes nigérianes (mineures pour nombre d’entre elles) sont victimes de réseaux criminels internationaux de trafics d’êtres humains. Elles subissent un serment d’allégeance, dit « Juju », visant à faire peser sur elle une menace de malédiction si elles ne respectent pas « leurs obligations ». Au cours de la cérémonie, elles sont scarifiées afin de les identifier et de marquer leur appartenance au réseau. Elles sont ensuite forcées à l’exil dans un périple dangereux durant lequel elles sont battues, violées et soumises à des actes de torture. Celles qui survivent sont envoyées en Europe, contraintes à la prostitution et soumises au remboursement d’une dette de plusieurs dizaines de milliers d’euros. Si elles parviennent à s’en sortir, les femmes risquent d’être exposées, en cas de retour au Nigéria, à de graves persécutions pour avoir quitté le réseau et du fait du stigmate qui pèse sur les femmes nigérianes victimes de viols et de prostitution, les condamnant à une mort sociale et un risque élevé de re-prostitution.

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Meghan Murphy : Honte et pornographie

Le porno a été totalement normalisé et généralisé, alors pourquoi les hommes ont-ils encore honte de leur consommation de porno ?

Depuis de nombreuses années, on m’accuse de « faire honte » aux gens à propos de leurs passe-temps sexuels. Cela est dû en grande partie à mes critiques du porno et de l’industrie du sexe.

Pour être honnête, j’ai probablement écrit et dit des choses moins que positives sur diverses perversions et fétiches, en particulier ceux de nature violente. Je n’ai jamais caché mon opinion sur les hommes qui ont besoin de costumes, de sketches, de scénarios tordus ou de spectacles pornographiques pour prendre leur pied. Votre corps est littéralement conçu pour apprécier le sexe : le bon vieux sexe classique du type pénis dans le vagin. Bien entendu, ce sexe « normal » est qualifié de « vanille » afin de défendre les personnes qui ont conditionné leur corps et leur esprit à avoir besoin d’un tas de cloches et de sifflets pour faire ce que la nature a prévu, bien avant l’invention des téléphones intelligents et du Hentai. Mais exiger un costume ridicule ou une expérience de mort imminente, que ce soit pour vous ou pour l’objet de votre éjaculation, me semble signaler l’existence d’un réel problème.

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L’enfer des passes, de Rachel Moran [compte rendu]

[La note suivante a été publiée dans la revue Empan]

Le système prostitutionnel fait l’objet depuis de nombreuses années d’études féministes variées : Barry (L’esclavage sexuel de la femme, 1982), Legardinier (Prostitution : une guerre contre les femmes, 2015), Ekman (L’être et la marchandise, 2013), Montreynaud (Zéromacho, 2018).

Les témoignages de prostitué·es peinent à s’exprimer ou à se faire entendre, et plus encore les témoignages d’ex-prostituées. Pourtant, ces dernières en particulier sont celles dont « l’objectivité » n’est pas polluée par des intérêts immédiats dans le système prostitutionnel, avec l’avantage de posséder une connaissance poussée, prolongée et intime du milieu et de l’activité. C’est ce qui donne une richesse et une rare force au livre L’enfer des passes de la féministe irlandaise Rachel Moran, qui a vécu la prostitution pendant sept ans.

Les quelque 26 chapitres sont « un exercice de dépassement » (p. 327) d’elle-même afin de renaître de ses hontes – pour reprendre le titre d’un autre livre d’une ancienne prostituée, Laurence Noëlle. Moran y dissèque son propre parcours et brave « les ondes de choc » (p. 307) de son passé de femme prostituée, dont le stigmate perdure dans le temps – malgré la récente loi abolitionniste qui décriminalise leur activité.

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Zéromacho : Action #89 — 12 avril 2023 — Le 17e passe à l’orange

Le 17e arrondissement de Paris bat un triste record : il compte 49 prétendus « salons de massages » asiatiques (sur 341 dans tout Paris) qui sont en réalité des lieux de prostitution, avec des esclaves sexuelles pour la plupart victimes de la traite des femmes.

Cette activité illégale a pignon sur rue et fait même de la publicité, avec des flyers sur les pare-brise !

Dans la nuit du 12, à Paris 17e, des activistes de Zéromacho et de L’Amazone Paris ont taggé un slogan en orange fluo sur le trottoir devant ces 49 salons :

« C’est combien ? — 1 500 € d’amende ! »

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Un congrès CGT sous haute tension pour le mouvement syndical et féministe [par Resyfem ]

Fin mars 2023, aura lieu le congrès confédéral de la CGT et ça promet d’être houleux : remise en cause de la candidature de Marie Buisson par un camp sectaire et viriliste, du critère de « parité » sur les listes des candidats à la CEC… Les enjeux d’un congrès décisif pour les syndicalistes féministes, l’ensemble de la CGT et tout le mouvement syndical.

Une campagne virulente de remise en cause de la candidature de Marie Buisson au poste de secrétaire générale de la CGT a commencé très vite après son annonce. Elle s’est notamment traduite, ces dernières semaines, par la multiplication d’articles à charge dans la presse[1].

D’où viennent ces attaques, et pourquoi autant d’énergie déployée pour la faire échouer ?

Il s’agit d’une offensive des tendances sectaires de la CGT qui entendent bloquer toute logique unitaire et d’ouverture aux urgences environnementales et à une lutte des classes qui prenne en compte les oppressions spécifiques liées au sexisme et au racisme. En entretenant une atmosphère de guerre interne, ils tentent au passage le coup double de réhabiliter leurs partisans les plus controversés.

Des attaques violentes aux formes inédites

Les détracteurs de Marie Buisson s’appuient sur des tensions réelles au sein de l’organisation, en lien avec le mode de gouvernance et les choix stratégiques de Philippe Martinez. 

Ce mécontentement se cristallise sur sa décision de faire participer la CGT à l’initiative « Plus jamais ça ! »[2]. Une sorte de coalition des opposants à ce projet s’est constituée, et reproche à Marie Buisson la décision du secrétaire général !

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Communiqué de presse : La Grande Cause définitivement classée sans suite ? 

Nos associations, le Collectif Féministe Contre le Viol, Osez le Feminisme!, l’Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail (AVFT), Du Côté des Femmes, En Avant Toute(s), Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF) et la Fondation des Femmes, ont découvert via un article du Journal Du Dimanche l’existence d’une dépêche interministérielle en direction des procureurs de la République, qui aurait débouché sur des classements sans suite massifs et un déni de justice pour des milliers de victimes.

Un classement sans suite désigne l’arrêt d’une procédure judiciaire consécutive à une plainte. C’est le procureur de la République qui en prend la décision. Dans une dépêche de mai 2021, il a été demandé d’accélérer le classement sans suite de nombreuses plaintes pour désengorger les commissariats et services d’enquêtes.

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Andrea Dworkin : À propos de la rédaction de « Pornographie : les hommes s’approprient les femmes ».

[Ce qui suit est une partie d’un article d’abord publié dans la San Francisco Review of Books. Copyright © 1981 par Andrea Dworkin.] (Pornographie : les hommes s’approprient les femmes, éditions Libre)

Au cours de la rédaction de mon plus récent livre, j’ai vécu le plus extrême isolement que j’aie connu en tant qu’écrivaine. Je vivais dans un monde d’images — des corps de femmes exposés, des femmes prostrées, étalées, suspendues, écartelées, ligotées et lacérées — et dans un monde de livres — remplis de viols collectifs, de viols à deux, de viols commis par des hommes sur des femmes, de viols lesbiens, de viols de femmes par des animaux, d’éviscérations, de tortures, de pénétration, d’excréments, d’urine et de mauvaise prose. J’ai travaillé trois ans à ce livre. Après la première année, une amie est entrée dans ma chambre et m’a passé la remarque qu’elle était plus à l’aise dans les magasins de porno du quartier. Six mois plus tard, l’ami avec lequel je vivais m’a demandé calmement et sincèrement d’éviter de lui montrer les documents sur lesquels je pouvais travailler et aussi, si possible, de ne pas les laisser dans une autre pièce que la mienne. J’ai des ami-es bon·nes et prévenant·es. Leurs nerfs ne pouvaient même pas supporter le peu qu’illes apercevaient. Moi, j’y étais immergée.

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Julie Bindel : Les femmes ne devraient pas avoir à toujours être sur le qui-vive. C’est aux hommes d’en finir avec la violence masculine

[article publié en mars 2021]

La disparition et le meurtre présumé de Sarah Everard ont mis en lumière la façon dont la vie des femmes et des jeunes filles est entravée par la peur et la réalité de la violence masculine. La violence létale contre les femmes est aussi régulière qu’elle est horrible. Tous les trois jours, en Angleterre et au Pays de Galles, une femme est tuée par son ancien ou actuel partenaire à la suite de violences domestiques, et nous vivons aujourd’hui dans une société imprégnée de misogynie et de droit phallocrate, où la pornographie hardcore est considérée comme un « divertissement » et où les filles sont bombardées de propagande sur les joies de l’étranglement durant les rapports sexuels.

Il est relativement rare de se faire enlever dans la rue, mais malgré tout, les femmes restent dans un état d’anxiété constant face à la violence masculine. Il n’y a rien d’étonnant à cela : la plupart d’entre nous sommes éduquées à nous considérer seules responsable de notre propre sécurité. Nous vivons dans une culture de culpabilisation des victimes, où l’on s’intéresse davantage à notre façon de nous habiller et à notre consommation d’alcool qu’aux raisons qui expliquent pourquoi les hommes commettent des crimes aussi odieux à notre encontre.

Les hommes sont majoritairement les auteurs de crimes violents et sont aussi majoritairement les victimes de crimes violents, mais perpétrés par d’autres hommes. Ce fait est souvent utilisé contre les féministes lorsque nous parlons de l’ampleur et de la prévalence des abus sexuels et domestiques, mais le féminicide – le meurtre d’une femme parce qu’elle est une femme – se nourrit de la haine des hommes envers les femmes.

La peur du viol et des violences létales est une chose que toutes les femmes de la planète connaissent. Il y a nulle part où nous nous sentons totalement en sécurité. Le foyer est l’endroit le plus dangereux pour les femmes puisque c’est là que la plupart des violences ont lieu, mais comme elles se produisent derrière des portes closes, elles peuvent souvent être considérées comme une affaire interpersonnelle privée, et engageant encore moins l’intervention de l’État. Le nombre de viols et d’agressions sexuelles commis quotidiennement est ahurissant, et pourtant la grande majorité d’entre elles ne sont pas signalées et restent impunies. Actuellement, moins de 1 % des viols signalés à la police aboutissent à une condamnation.

Une enquête commanditée par la coalition End Violence against Women en décembre 2018 a révélé que plus d’un tiers des plus de 65 ans ne considèrent pas les rapports sexuels maritaux forcés comme des viols, de même que 16 % des personnes entre 16 à 24 ans.

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La prostitution est un enfer particulier que les hommes ont créé pour les femmes.

Ou

Le coût de la vente de votre âme pour survivre? Il est sans prix.

Source: Site Web de l’organisation Northern Model Now, le 8 septembre 2022

Une femme, qui souhaite rester anonyme, a envoyé ce texte puissant et déchirant par l’intermédiaire de notre page « Share Your Sex Work Story » (Partagez votre récit de la prostitution), qui offre un espace aux femmes pour raconter en leurs propres mots leur vécu de la prostitution.

Quand je ferme les yeux, je m’en souviens. Je ne vais pas mâcher mes mots. Ma vie était un enfer. Il n’y a jamais eu de moment où je n’étais pas malheureuse, ou déprimée.

Ma propre famille a fait de moi un bouc émissaire et m’a appris que ma valeur dépendait de la façon dont je leur faisais plaisir – que non seulement je ne devais pas m’attendre à l’amour ou au bonheur, mais bien à de la douleur et de la cruauté. En raison de mon handicap, j’étais une cible de choix pour les brimades : je n’ai jamais été encouragée à être quelque chose de plus que ce que les autres pensaient de moi. On me répétait sans cesse à quel point j’étais inutile.

Quand on passe son enfance et son adolescence à se faire rabâcher cela, vous n’aspirez plus à être autre chose que douce et humble. Vous n’apprenez pas à établir des limites. Vous n’apprenez pas à vous défendre. Vous apprenez seulement à éviter de souffrir davantage.

Étant handicapée, on attendait de moi que j’agisse normalement. Ma famille m’a laissée me débrouiller et je suis tombée dans le piège du « travail du sexe ». Je suis tombée dedans à cause d’un ex qui se comportait comme mes deux parents en un. C’était un sentiment familier, que je détestais et craignais à la fois et vers lequel je me sentais attirée, parce que c’est tout ce que je connaissais à l’époque. Personne ne m’a aidée ou a pris soin de moi. Personne ne s’est soucié de ce que je ressentais.

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« Vous allez devoir débarrasser mon cul de votre fantasme », compte-rendu de Pornographie d’Andrea Dworkin par Didier Epsztajn

Andrea Dworkin : Pornographie
Les hommes s’approprient les femmes

Editions Libre 2022, 340 pages, 20 euros

« J’ai rencontré d’énormes difficultés à écrire et à publier cet ouvrage. La pornographie que j’ai dû étudier pour l’écrire a envahi ma vie et m’a plongée dans une grande détresse personnelle. J’ai beaucoup de difficulté à gagner ma vie pendant cette période, en partie parce que les magazines et les journaux refusaient, presque sans exception, de publier mes écrits. Les maisons d’édition ne voulaient pas publier ce livre. L’achèvement de ce livre est pour moi le triomphe d’une écrivaine se battant pour sa survie. De nombreuses personnes m’ont aidée et je ne les oublierai jamais. Il est à la fois juste et véridique de dire que j’aurais sombré sans leur aide ». Andrea Dworkin dans ses remerciements en fin de livre.

Il aura fallu plus de quarante ans pour que Pornography : Men possessing Woman soit enfin traduit en français. Il faut en remercier Ann Leduc et Martin Dufresne. J’aurais aimé lire un tel livre beaucoup plus jeune, pour moins m’égarer dans certaines lectures, au nom d’une conception bien masculiniste de la liberté sexuelle revendiquée. L’autrice ne joue pas sur les mots, elle utilise ceux du quotidien dans toute leur âpre nudité. Elle ne se laisse pas tromper par des allégations sur l’érotisme et l’encensement d’ouvrages ouvertement pornographiques et violents, elle nomme et analyse des livres, des images, des productions de l’industrie pornographique. Andrea Dworkin discute des violences masculines faites aux femmes, des conséquences sociales de la consommation de pornographie, des rapports de domination, de l’humiliation des femmes parce qu’elles sont des femmes. Elle aborde aussi des productions soi-disant scientifiques naturalisant la domination masculine, discréditant le non des femmes, justifiant la violence et le viol… Quarante après, un livre toujours d’actualité.

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Martin Dufresne : Quand PIVOT pivote…

[Juste en dessous, un petit « coup de gueule » de mon ami Martin.]

La revue PIVOT nous a servi cette semaine la nouvelle version d’un procédé récent qui s’assimile à une censure, soit une campagne de pression pour forcer une dramaturge à réécrire une pièce en réponse aux revendications d’un lobby. On note comme un goût de déjà-vu…

Dans ce cas-ci, ce sont des défenseurs de l’achat de sexe et du proxénétisme qui réclament de l’autrice Véronique Côté qu’elle modifie une pièce qui doit prendre l’affiche au Théâtre La Bordée de Québec dans un mois. La nouvelle pièce « La paix des femmes », un dialogue entre deux personnages aux opinions opposées, est accusée de ne pas soutenir suffisamment la thèse du Comité Autonome du Travail Sexuel (CATS), un groupe de pression qui exige la dépénalisation totale de l’achat de sexe et du proxénétisme au Canada.

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Andrea Dworkin : Introduction de son ouvrage Pornographie

1

Je n’hésitai pas à faire courir le bruit que tout homme blanc qui se proposerait de me fustiger aurait aussi à me tuer.

Vie d’un esclave américain, écrite par lui-­même,
Frederick Douglass (1845)

En 1838, à l’âge de 21 ans, Frederick Douglass devint un esclave en cavale, un fugitif pourchassé. Même si plus tard il devait acquérir sa renommée en tant que puissant orateur politique, il prononça ses premières paroles publiques avec trépidation lors d’une réunion d’abolitionnistes de race blanche au Massachusetts en 1841. Le leader abolitionniste William Lloyd Garrison décrivit ainsi l’évènement :

« Il s’approcha de l’estrade avec une certaine hésitation et gêne, sans aucun doute les pendants d’un esprit sensible dans une situation aussi peu familière. Après s’être excusé de son ignorance, et avoir rappelé à l’auditoire que l’esclavage est une bien pauvre école pour l’intelligence et le cœur humains, il fit le récit de certains épisodes de sa propre histoire en tant qu’esclave […]. Dès qu’il eut regagné sa place, je me levai, empli d’espoir et d’admiration, et rappelai à l’auditoire les risques auxquels s’exposait dans le Nord ce jeune homme émancipé par lui-­même — même au Massachusetts, sur la terre des pèlerins fondateurs, au milieu des descendants des Pères de la révolution ; et je leur demandai s’ils accepteraient jamais de voir celui-­ci ramené de force en esclavage — quoi qu’en dise la loi, quoi qu’en dise la Constitution[1]. »

Constamment en danger dans son état de fugitif, Douglass devint tout à la fois organisateur dans le camp abolitionniste ; éditeur de son propre journal qui plaidait en faveur de l’abolition et des droits des femmes ; chef de gare au sein du « chemin de fer clandestin » ; un proche camarade du célèbre John Brown ; et, lors de la convention de Seneca Falls en 1848, il fut la seule personne à seconder la résolution d’Élizabeth Cady Stanton réclamant le droit de vote pour les femmes. De mon point de vue, il était un héros politique ; une personne dont la passion pour les droits humains était à la fois visionnaire et ancrée dans l’action ; quelqu’un qui a pris des risques réels et non rhétoriques et dont l’endurance dans sa quête pour l’égalité a établi une norme en ce qui concerne l’honneur en politique. Ses écrits, aussi éloquents que ses discours, exprimaient son rejet catégorique de toute subjugation. Son intelligence politique, à la fois analytique et stratégique, était imprégnée d’émotions : l’indignation face à la douleur humaine, l’affliction face à l’avilissement, l’angoisse face aux souffrances, et la fureur face à l’apathie et à la collusion. Il détestait l’oppression. Son empathie pour celles et ceux qui souffraient de l’injustice dépassait les frontières de la race, du genre et de la classe parce qu’elle était animée par son propre vécu — l’expérience de l’humiliation et celle de sa dignité.

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Sophie Péchaud : « Comme un poisson dans l’eau… d’un bocal »

[Article reproduit avec l’aimable autorisation de l’autrice.]

Depuis 1985, date de la création de l’AVFT et même bien antérieurement à celle-ci, nulle autre période que l’épidémie de Covid n’a eu un impact aussi fort sur l’organisation du travail et le quotidien des travailleuses. Du jour au lendemain, la très grande majorité des Françaises et des Français a été contrainte de modifier en profondeur sa façon de travailler et ses interactions avec le monde extérieur : collègues, supérieurs, patron.ne.s, prestataires, client.es.
La pratique du télétravail, assez peu répandue avant mars 2020 est devenue la norme pour toutes les professions qui pouvaient être « dématérialisées », alors que les secteurs du soin, de la santé, de l’hôtellerie, du ménage, surreprésentés par les femmes -et dans lesquelles les violences sexuelles au travail sont très importantes- ont été encore plus durement touchés par la crise sanitaire.

Si la hausse des violences conjugales pendant la période du covid a été rapidement documentée face à l’augmentation massive des signalements [1] , une semaine à peine après la date du premier confinement, l’impact du covid sur les violences sexistes et sexuelles au travail est toujours un angle mort.

Pendant le premier confinement de mars 2020, l’activité de l’AVFT n’a pas cessée, l’accueil téléphonique a été maintenu sans interruption. Même si le nombre de saisines de l’association par les victimes de violences sexuelles au travail a baissé pendant cette première période, il a augmenté considérablement à l’approche du déconfinement puis dans les mois qui ont suivi. Nous avons alors reçu plusieurs témoignages de femmes pour qui la crise sanitaire a eu un effet sur les VSS au travail qu’elles subissent ou subissaient.

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Un nouvel espoir pour Alexandra Richard !

Admise devant la Cour de Cassation, son affaire pourrait être rejugée à l’issue de la procédure Le pourvoi en Cassation formé par Alexandra Richard à la suite de son procès en appel, qui l’a condamnée à 10 ans de prison ferme en octobre 2021, a été accepté par la Cour de Cassation. Le rapporteur public considère que les questions posées sont inédites et qu’elles méritent d’être examinées. Nous y voyons un espoir que le déni de justice dont Alexandra Richard est victime soit enfin reconnu comme tel. 

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Michel Piron en garde à vue. Derrière Jacquie et Michel : un système organisé de proxénétisme et de viols.

[communiqué de presse d’Osez le féminisme !]

Nous nous réjouissons d’apprendre que Michel Piron, propriétaire de Jacquie et Michel, et quatre complices, sont actuellement en garde à vue pour des faits de proxénétisme, complicité de viols et d’agressions sexuelles. L’impunité des pornocriminels se fissure, et la justice écoute enfin les victimes. C’est toute l’industrie pornographique qui est dorénavant face à la justice : acteurs, rabatteurs, producteurs, réalisateurs, diffuseurs constituent un véritable système proxénète et criminel. Nous exigeons que cesse cette zone de non-droit qu’est la pornographie.

En 2020, Osez le Féminisme, les Effrontées, et le Mouvement du Nid ont fait des signalements contre Jacquie et Michel pour proxénétisme, viols, traite des êtres humains et actes de torture et de barbarie, suite à l’enquête du journaliste Robin d’Angelo, qu’il relate dans “Judy, Lola, Sofia et moi”, et dans la vidéo-enquête sur Konbini de février 2020. Dans cette vidéo, l’un des fondateurs de ARES, la société propriétaire de Jacquie et Michel déclarait à propos de leurs méthodes de rabattage : “En France, (…) c’est interdit. C’est du proxénétisme. De toute façon, si tu trouves une fille, on met un truc qui n’a rien à voir (…) pour ne pas s’attirer les foudres”. La défense de Piron qui consiste à dire qu’il n’était pas au courant des violences commises sur les tournages est intenable alors que ce sont les diffuseurs qui commandent ces contenus violents et dégradants aux producteurs. Le “porno amateur” est un vaste mensonge. Seul existe un système de proxénétisme organisé. Les pénétrations sexuelles obtenues sous contrainte, les violences sexuelles et les actes de torture infligés, les manipulations commises contre des femmes rabattues et piégées, les diffusions incontrôlées des vidéos sont la norme de cette industrie criminelle. 

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Romane Bouché : L’appel à l’aide de Zahia Dehar

Dans un « live » Instagram, Zahia Dehar, 29 ans, s’est exprimée sur la prostitution. Son parcours, glaçant, résonne comme celui de milliers de mineures en France. Il est temps que le soutien nécessaire lui soit apporté, comme à toutes les victimes de prostitution. 

Nous sommes le 11 décembre 2021 lorsque Zahia Dehar prend la parole sur son compte Instagram. Prostituée à 16 ans, elle est révélée au grand public en 2008 par l’affaire qui porte son nom. Certains parlent même, depuis « d’effet Zahia ».

Karim Benzema et Franck Ribéry, grands noms du football sont mis en cause pour avoir été ses « clients » prostitueurs ». Passibles d’une peine de prison pour prostitution de mineure, ils n’ont pas été condamnés. La justice a estimé qu’ils ne savaient pas qu’elle était mineure au moment des faits.

Treize ans plus tard, le traumatisme resurgit. « J’avais entendu dire que beaucoup de victimes de pervers narcissiques voulaient se suicider et je me rends compte que c’est vrai», explique Zahia en sanglotant. « J’ai même essayé de me tailler les veines il n’y a pas longtemps. C’est là, vous voyez, c’est ce que j’ai fait ». Elle montre son bras à la caméra.

On est loin de l’image policée de la star dUne fille facile, le film de Rebecca Zlotowski récompensé à la Quinzaine des Réalisateurs du festival de Cannes en 2019. Car oui, derrière le fantasme de la prostituée, derrière la notoriété d’une jeune fille manipulée, propulsée dans le show-business, se cache une réalité violente.

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Osez le féminisme ! : L’industrie pornocriminelle cible les enfants et la justice abdique ! (Communiqué de presse)

Malgré la loi qui l’interdit, l’industrie pornocriminelle cible les enfants, les conditionne à l’érotisation de la violence sexuelle, à la culture du viol, à la haine des femmes, à la haine raciale, en toute impunité. L’ARCOM a saisi le 8 mars 2022 la justice qui vient ce 24 mai de refuser le blocage de cinq sites pornographiques pourtant mis en demeure de vérifier l’âge des internautes. La Justice a fait primer les intérêts des pornocrates et des “consommateurs” de pornographie sur les droits fondamentaux et l’intégrité psychique et physique des enfants. 

La star Billie Eilish a déclaré avoir visionné du porno dès l’âge de 11 ans, et que cela avait “détruit son cerveau”. Au moment d’entrer dans la sexualité, “dévastée” par la pornographie, elle n’a pas réussi à refuser des pratiques violentes non désirées et reste hantée par des cauchemars, conséquences traumatiques de son exposition précoce à des violences sexuelles pornographiques. 

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Sortie de « Last Girl First ! La prostitution à l’intersection des oppressions sexistes, racistes et de classe » une étude de CAP International.

Le 22 Mars, CAP International a sorti le rapport de recherche « Last Girl First ! La prostitution à l’intersection des oppressions sexistes, racistes et de classe ».

Ce rapport est le fruit de deux ans de recherche, il couvre 49 pays, rassemble les témoignages de plus de 40 survivantes de la prostitution et de la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle, d’expert.e.s de terrain travaillant auprès des personnes en situation de prostitution aux quatre coins du monde et compte plus de 500 références.

Cette étude explore la surreprésentation des femmes et des filles issues des communautés les plus marginalisées dans la prostitution. Partout dans le monde, les femmes autochtones (Premières Nations, Maori, Adivasi), migrantes, pauvres, issues de minorités ethniques, raciales ou religieuses, des castes les plus basses (Dalits, Badi) sont impactées de manière disproportionnée par le système prostitutionnel.

La recherche « Last Girl First » développe va ainsi au-delà d’une simple analyse de la prostitution en termes de risques sanitaires et offre une analyse complète des oppressions intersectionnelles qui façonnent la prostitution.

En retraçant les racines historiques, politiques, sociales et les dynamiques de ce système, cette étude met en lumière les réalités de la prostitution et la manière insidieuse dont différents schémas de domination tels le patriarcat, le racisme, le colonialisme, l’impérialisme, la domination de classe, le capitalisme, la guerre et la militarisation façonne le système prostitutionnel et aboutissent à l’exploitation économique et sexuelle de franges entières de la population. Parmi ces dernières, la classe politique des femmes et particulièrement celles en situation de précarité ou racisées. Elles sont celles qui sont désignées comme « prostituables », comme une classe à part devant satisfaire la demande masculine pour l’exploitation de leur corps.

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Pour que le #MetooSyndical s’amplifie !

Pour que le Metoo syndical s’amplifie !

Une militante syndicale vient de déposer plainte contre un syndicaliste de la CGT pour « viol, agression sexuelle, torture et actes de barbarie ». Nous sommes bouleversées. Nous pensons à elle, sa force, son courage et à ses soutiens. Nous lui adressons notre solidarité sans faille face à ces faits gravissimes et aux pressions exercées contre celles qui voudraient s’exprimer. Nous sommes disponibles pour toutes actions en soutien de la camarade victime, à partir de son rythme et de sa volonté.

Les mandats confédéraux de cet homme ont été suspendus par la commission exécutive confédérale (CEC) de la CGT le 22 février 2022. Nous saluons la réactivité de cette mesure mais cela ne suffit pas. La suspension de ses mandats confédéraux n’a pas fait l’unanimité avec 1 vote contre et 3 abstentions. Les syndicalistes qui ne votent pas de mesures conservatoires pour protéger de toute forme de représailles, la victime, et les syndiqué.es qui vont devoir continuer de les côtoyer, sont les complices des agresseurs et de l’impunité dont ils bénéficient.

Nous espérons qu’une enquête interne menée par la cellule de veille de la CGT permette d’avancer dans la connaissance des faits, du passif de ce « militant » pour prendre les décisions définitives qui s’imposent. Dans le communiqué du 28 février 2022, l’Union départementale 94 ose le maintenir dans ses mandats locaux. Pour nous, il n’est pas possible de s’en rendre à la justice de Dupond-Moretti et la police de Darmanin, membres d’un gouvernement dont nous combattons les politiques libérales et liberticides et représentants d’une justice patriarcale qui tranche rarement en faveur des victimes de violences sexuelles. Cette décision est une nouvelle agression pour la victime et toutes celles et ceux qui se battent dans la CGT et dans les autres syndicats pour stopper ces violences où qu’elles soient commises (travail, syndicat, vie conjugale…).

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Continuer la lutte anti-militariste avec l’inspiration d’Andrée Michel

En honneur à son enthousiasme et sa fougue, à son courage et à son exemple de lutte, quelques éléments de son parcours et de sa réflexion, repris de la préface de son dernier ouvrage : https://www.editions-ixe.fr/catalogue/feminisme-et-antimilitarisme/. Andrée Michel est décédée le 8 février 2022.

Andrée Michel : une féministe anti-militariste dans le siècle

Larges extraits de l’Avant-propos de Jules Falquet au livre d’Andrée Michel

Hay mujeres que luchan un día, y son buenas
Hay mujeres que luchan muchos dias, y son muy buenas
Hay mujeres que luchan muchos años, y son mejores
Y hay mujeres que luchan 101 años
Estas son las imprescindibles 

Bertold Brecht (adaptation)

Solo le pido a Dios
Que la guerra no me sea indiferente
Es un monstruo grande y pisa fuerte
Toda la pobre inocencia de la gente
 
Chanson de Mercedes Sosa

On connaît généralement Andrée Michel comme l’une des premières sociologues de la famille, puis des femmes et du travail, dans les années 1960 et 1970 en France. Pourtant, au-delà de ces travaux novateurs, aujourd’hui devenus classiques, on a à faire à une féministe « intégrale » – à la fois militante et chercheuse – et à une précurseuse dans plusieurs autres domaines capitaux, notamment la sociologie des migrations mais aussi, et surtout, le militarisme et le Complexe militaro-industriel (CMI), expression traduite de l’américain qu’elle a été la première à utiliser en France (Michel, 1985a). 

Dans les années 1950, elle ouvre le champ de la sociologie des migrations en France, étudiant et dénonçant les conditions de logement et de travail des ouvriers algériens, tout en s’engageant dans les luttes anti-coloniales, algériennes en particulier. Dès les années 1960, elle milite activement au Planning familial, publie l’un des premiers ouvrages de référence sur la situation des femmes (Michel et Texier, 1964), puis le premier (et unique) « Que sais-je ? » sur le féminisme, paru en 1972 et traduit en six langues. Après plusieurs années à enseigner en Algérie, puis aux États-Unis et au Canada, revenue en France elle fonde en 1974 la première équipe de recherche sur les femmes au CNRS. 

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Déviriliser le monde, une urgence

Plusieurs publications féministes sortiront prochainement en librairie : Féminisme et réseaux sociaux – une histoire d’amour et de haine(éd. Hors d’atteinte) de Elvire Duvelle-Charles et Déviriliser le monde – demain sera féministe ou ne sera pas (éd. Rue de l’échiquier) de Céline Piques.  Les deux autrices sont des activistes de longue date ; la première a débuté au sein des Femen, la seconde est dans Osez le féminisme !, en tant qu’actuelle présidente de l’asso.

Bien que l’ouvrage Féminisme et réseaux sociaux m’ait fait découvrir tout un pan de l’activisme numérique – de sa force mais aussi des difficultés, des pièges et des impasses rencontrées dans ce type de mobilisation – je vais me concentrer sur l’ouvrage de Céline Piques.

Son Déviriliser le monde, pensé « comme un manifeste politique », est le 3ème titre féministe de la belle petite collection Les incisives, après celui de Réjane Sénac (L’égalité sans condition) et celui de Reine Prat (Exploser le plafond).

Dans son avant-propos, l’autrice précise qu’elle défend un « féminisme matérialiste » associé à une perspective « écoféministe ». Les cinq chapitres qui suivent alors se déclinent ainsi : « lutter contre les violences masculines », « lutter contre les violences prostitutionnelles et pornocriminelles », « se réapproprier nos corps », « se réapproprier notre travail et repenser la famille », et pour conclure « se réapproprier nos vies ». Un vaste programme qui traite aussi bien du lesbianisme, du travail ménager, de la fiscalité, de la correctionnalisation des viols, des droits reproductifs, de la médecine, de la stratégie de l’agresseur, de l’instrumentalisation du féminisme à des fins racistes, et des désastres écologiques en cours ; avec parfois, pour ce faire, une mise en comparaison avec d’autres pays.

J’ai particulièrement apprécié sa critique du « consentement » – « un concept vicié » – qui rejoint celle de C. Le Magueresse, ainsi que sa dénonciation du calcul des impôts, qui va dans le même sens que le diagnostic posé par C. Delphy. Certaines des propositions de Céline Piques consiste en un recours à l’état pour pallier les inégalités. Elle plaide par exemple pour un « véritable service public de la petite enfance », quand le désinvestissement des hommes vis-à-vis de leurs enfants est flagrant. Sur ce sujet, la remarque de Delphy persiste : « Les revendications sont adressées aux patrons, ou à l’Etat, jamais aux hommes ». Et la question demeure : « Par où attaquer le « partage inégal » du « travail ménager » ? »

Voici quelques idées ou citations que j’ai particulièrement retenues du livre, et je ne doute pas que son lectorat en retiendra bien d’autres :

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Didier Epsztajn : Grimpons au sommet d’un building histoire d’aller croquer quelques avions de chasse

« La culture systémique du viol préside à l’organisation de nos sociétés occidentales. L’objet de ce livre est de montrer qu’elle irrigue aussi tout un pan de la culture pop : celui des dinosaures en littérature et au cinéma »

Loin des tristesses ou de l’arrogance de certaines analyses, Ïan Larue éclaire la nuit de ludiques images. Elle nous parle avec humour de dinosaures, de constructions mentales, de serpent et d’anathème religieux, « Les animales que nous fantasmons sous le nom de reptiles sont pensées comme notre envers diamétral », de scènes cultes hollywoodiennes, de reptiliennes et de déesses.

Je souligne sa capacité à rire des constructions sexistes des mondes, de l’idéologie sociale masculiniste, « Les petits riens comme les grands sauriens », des imaginaires normées pour que rien ne change dans la domination, des fantasmes masculinistes de bipède alpha et assassin, de la taxonomie hiérarchisante, de la glorification fantasmatique du tirex, des frontières construites et déplacées, « cette ligne mythifiée qui abrite la civilisation », des monstres qui éblouissent les petits garçons, de la jungle au prisme hollywoodien, des tartes à la crème du patriarcat, « Accuser la victime d’un viol d’avoir provoqué ce crime et la tragédie qui s’en suit est une des tartes à la crème du patriarcat »…

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Osez le féminisme ! (Communiqué de presse)

Osez le féminisme ! fait 200 signalements de vidéos illégales sur des sites pornographiques
Le 21 janvier 2021, Osez le féminisme ! a procédé à 200 signalements sur le site du ministère de l’Intérieur PHAROS. Les vidéos signalées sont des contenus illégaux hébergés par des sites pornographiques : actes de torture et de barbarie, incitations à commettre des crimes et des délits, pédocriminalité, viols, apologie de la haine raciale. Ces images intolérables contreviennent au droit pénal et international mais restent accessibles à toutes et à tous sur Internet.  Engagée depuis plus de 10 ans contre le système pornocriminel, l’association Osez le féminisme ! est partie civile dans ce qui se profile comme un procès historique en matière de violences sexistes et sexuelles avec 50 victimes identifiées, dont une trentaine bénéficient d’un accompagnement juridique, social et psychotraumatique par l’association, et potentiellement 500 hommes mis en cause. L’affaire “French Bukkake” a déjà un impact inédit avec 4 producteurs et 4 “acteurs” mis en examen en octobre 2021. Pour autant, les avancées restent trop timides au regard des dégâts considérables causés par l’industrie pornocriminelle.  La pornographie est une indutrie internationale multimiliardaire qui repose sur des activités illégales et sert d’alibi à des violences et humiliations extrêmes contre les filles et les femmes les plus vulnérables (femmes en situation de précarité économique, victimes de violences sexuelles, filles et femmes en zone de catastrophes humanitaires, etc.). Le consentement de ces femmes est extorqué, les vidéos des violences sexuelles qu’elles ont subies sont postées sur Internet, elles subissent des humiliations à grande échelle qui ont des conséquences physiques et psychologiques catastrophiques (prolapsus anaux et vaginaux, tentatives de suicide, brûlures, hospitalisations, etc.). Alors que ces réalités sont bien connues, les pouvoirs publics refusent de prendre leurs responsabilités. L’hégémonie et l’impunité des grandes entreprises productrices de contenus pornographiques reste immense : les victimes ont beau se tourner vers les autorités compétentes comme la CNIL, les vidéos postées sans leur accord restent en ligne et continuent de détruire leur vie.  Dans le même temps, l’impact sur la société toute entière est frappant. L’exposition des jeunes à ces contenus (l’âge moyen du premier visionnage d’une video  pornographique en France est situé entre 13 et 14 ans d’après l’IFOP) a des répercussions sur leur développement et la construction de leurs modèles sexuels, des comportements violents sont banalisés et reproduits, des crimes sont normalisés et érotisés. Nous dénonçons un deux poids deux mesures scandaleux : les vidéos que nous avons signalées sont de nature à susciter l’indignation dans n’importe quel contexte. Or, lorsqu’il s’agit de pornographie – et donc prétenduement de sexualité – tout semble devenir acceptable. Nous refusons cette hypocrisie coupable. Violence et sexualité ne doivent pas être mélangées, une ligne nette doit être tracée pour la protection de tou.te.s.  Osez le féminisme !, à travers la dénonciation de milliers de vidéos illégales dans 200 signalements sur le portail PHAROS, appelle le ministère de l’Intérieur à se saisir sérieusement du sujet des violences perpétrées et légitimées par le système pornocriminel.   
Osez le féminisme !

Le nombrilisme trans – pourquoi des allié-e-s deviennent des TERFS

Par Olivia Boustra.

Bien joué.

Vous avez amené un transfemme à être considéré comme suffisamment femme pour être admis dans une prison pour femmes. Vous avez mis un violeur dans une prison de femmes, et vous avez rendu ça acceptable. Vous avez laissé des femmes se faire harceler par un violeur jusqu’à… Vous avez rendu ça acceptable. Parce que la validation de la personne trans comptait plus.

Bien joué

Vous avez fait expulser deux femmes d’un refuge pour femmes. Sous prétexte qu’elles s’inquiétaient de la présence dans leur espace sécurisé d’un mâle intact (avec pénis et testicules). Parce que les sentiments de la personne trans avaient plus d’importance.

Bien joué.

Vous avez rendu « cool » le fait de menacer des femmes de violences. À partir du moment où vous la traitiez de « TERF », c’était normal. Elle le méritait. Une sale transphobe mérite d’être attaquée, n’est-ce pas ? Il est acceptable de battre des femmes à coups de poing lors de manifestations puisque c’étaient des TERFS…

Bien joué.

Vous tyrannisez les gens qui ne veulent pas baiser avec vous. Vous les qualifiez de transphobes. Parce que votre validation a plus d’importance.

Vous avez créé de nouvelles lois qui permettent à n’importe quel homme d’accéder aux espaces réservés aux femmes. Dès que cet homme déclare : « Je suis une femme », il est cru et admis. Ainsi, les espaces féminins, créés pour des raisons de sécurité, deviennent maintenant votre territoire. Parce que les personnes trans ont plus d’importance.

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