[La note suivante a été publiée dans la revue Empan]
Le système prostitutionnel fait l’objet depuis de nombreuses années d’études féministes variées : Barry (L’esclavage sexuel de la femme, 1982), Legardinier (Prostitution : une guerre contre les femmes, 2015), Ekman (L’être et la marchandise, 2013), Montreynaud (Zéromacho, 2018).
Les témoignages de prostitué·es peinent à s’exprimer ou à se faire entendre, et plus encore les témoignages d’ex-prostituées. Pourtant, ces dernières en particulier sont celles dont « l’objectivité » n’est pas polluée par des intérêts immédiats dans le système prostitutionnel, avec l’avantage de posséder une connaissance poussée, prolongée et intime du milieu et de l’activité. C’est ce qui donne une richesse et une rare force au livre L’enfer des passes de la féministe irlandaise Rachel Moran, qui a vécu la prostitution pendant sept ans.
Les quelque 26 chapitres sont « un exercice de dépassement » (p. 327) d’elle-même afin de renaître de ses hontes – pour reprendre le titre d’un autre livre d’une ancienne prostituée, Laurence Noëlle. Moran y dissèque son propre parcours et brave « les ondes de choc » (p. 307) de son passé de femme prostituée, dont le stigmate perdure dans le temps – malgré la récente loi abolitionniste qui décriminalise leur activité.
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